Nizârites

Les Nizâriens, Nizârites, Nizaris sont une communauté mystique musulmane active depuis le XIe siècle. Ils sont aussi nommés Bâtinîs ou Batiniens car il professent une lecture ésotérique du Coran.



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Page(s) en rapport avec ce sujet :

  • Les Nizârites et les Croisés en Syrie. Le déclin :... Hassan Ali Shah, Imam héritier de la longue succession des Imams ismaéliens et nizârites, ... (source : templum.zabra)
  • Cet imam chiite n'a rien à voir avec l'imam qui, chez les sunnites, préside simplement à ... Établis au Liban, en Israël et en Syrie, au nombre d'environ 250.000, ... Les ismaéliens nizarites d'aujourd'hui sont dirigés par l'Aga Khan.... (source : herodote)
  • Les nizârites se réfugieront dans les montagnes de Syrie et de Perse.... qui fut proclamée par l'imâm ismaélien Hasan II alâ dhikrihi'l-salâm en 11643.... (source : iismm.ehess)

Les Nizâriens, Nizârites, Nizaris sont une communauté mystique musulmane (chiite ismaélienne) active depuis le XIe siècle. Ils sont aussi nommés Bâtinîs[1] ou Batiniens car il professent une lecture ésotérique du Coran. Le bâtin[2] étant le côté secret des choses.

En 1094, suite à une scission importante dans le chiisme ismaélien fatimide, une nouvelle prédication (da‘wa al-jadîda) fut organisée par Hasan-i Sabbâh, à partir du fort érigé sur le mont Alamut, au Sud-ouest de la mer Caspienne. À la fin du Moyen Âge, le développement de la communauté ismaélienne se poursuivit clandestinement sous le couvert du soufisme et a coïncidé avec l'essor de l'ismaélisme oriental (vingt-cinq millions de fidèles aujourd'hui), avec à leur tête l'Aga Khan.

Origine

Au départ, ceux qu'on nomme les Nizâriens ne sont que les adeptes de l'ismaélisme en Perse, c'est-à-dire une communauté chiite minoritaire dans une région sous la tutelle de vizirs sunnites. Sous la direction de leur chef charismatique Hassan-i Sabbâh, quelquefois surnommé «le Vieux de la Montagne», les ismaéliens prennent le contrôle du fort d'Alamût en 1090 et étendent leur influence en Iran ainsi qu'en Syrie.

Après la mort du calife fatimide Mustansir Billâh, en 1094, une grave scission se produisit dans la communauté ismaélienne au sujet de la succession à l'imamat. Al-Mustansir avait désigné son fils Nizâr comme héritier; par contre son jeune fils Ahmad gagna l'appui de son beau-père, le vizir Al-Afdhal qui le plaça sur le trône avec le titre d'al-Musta‘lî.

Hasan-i Sabbâh et les ismaéliens de Perse firent allégeance à Nizâr et sa descendance. Les ismaéliens s'emparèrent de la forteresse de Qadmûs (La Cademois pour les croisés) dans la région du Jabal Bahrâ‘ en 1132; Masyâf, la place forte principale fut prise en 1140-1141. C'est ainsi que les ismaéliens nizâriens de Syrie furent dirigés par des délégués envoyés par les Seigneurs d'Alamût; le plus célèbre d'entre eux était Rachid ad-Dîn Sinan (1162-1192) qui dirigea la prédication (da‘wa) ismaélienne en Syrie.

Selon la version ismaélienne, l'imam Nizâr, après s'être réfugié en Alexandrie, fut attaqué à plusieurs reprises par le vizir Al-Malik al-Afdhal. Finalement l'armée d'Al-Afdhal arrêta Nizâr et son gouverneur, et ils furent menés devant al-Musta‘lî. Le gouverneur fut tué sur le champ et l'imâm Nizâr mourut emprisonné en 1097. Avant de mourir, Nizâr désigna son fils al-Hâdî pour lui succéder au trône de l'imamat et ce dernier rejoignit Hasan ibn Sabbâh à Alamût. L'Empire fatimide était particulièrement affaibli par la crise économique et le manque d'unité parmi les ismaéliens. Qui plus est , le pouvoir militaire entre les mains du vizir Badr al-Jamâlî, un ancien esclave arménien, commençait à décliner, tandis que le pouvoir à Alamût subsistera jusqu'au XIIIe siècle.

Selon Wladimir Ivanow et Henry Corbin, le petit-fils de Nizâr (al-Muhtadî ?) était amené à la forteresse d'Alamût par Hasan ibn Sabbâh, qui dirigea la campagne nizârienne au nom de l'imam. La situation était analogue à la période de clandestinité (dawr al-satr), qui prévalait avant la montée des fâtimides, car les imâms restaient cachés (mastûr) à la vue du public pour éviter les persécutions dont ils étaient l'objet. Cette période de l'histoire est particulièrement confuse, car nous avons particulièrement peu de sources historiques ismaéliennes, la majorité des documents disponibles sont ceux écrits par les historiens sunnites, les plus âpres adversaires des ismaéliens nizâriens. Ces derniers croient que la descendance de Nizâr a survécu mais elle est demeurée cachée du public pour éviter les persécutions. Durant cette période d'incertitude Hasan-i Sabbâh était le représentant officiel qui entretenait une relation privilégiée avec l'imam pour mener la communauté à travers cette période turbulente.

Ainsi les historiens sunnites, ‘Atâ-Malik Juwaynî (gouverneur de Bagdad), Rashid al-din Fadl Allah et l'auteur du livre intitulé Sargudhasht-i Sayyidnâ nous ont rapporté une version partielle et non objective de l'ismaélisme qui s'est développé à Alamût. Hasan ibn Sabbâh était à la fois un homme politique et religieux. Selon Christian Jambet, «il créa un réseau de forteresses, servant à contrôler le territoire alentour, réseau qui, consolidé à partir de 1124 par son successeur Kiya Buzurg-Ummîd, comprenait des zones telles le Rudbar avec Alamût, centre de la nouvelle convocation, le Daylam et la région de Qazvin, le fief de Gerdkuh plus à l'est , non loin de Damghan, la région de Ray, quelques positions au Khuzestan, une forte implantation au Quhistan, entre Nichapur et Qâ'in.» [3]. Les régions appartenant aux ismaéliens nizâriens faisaient face aux différentes attaques de l'armée Saljûqs, de plus les Abbassides voulaient isoler les nizâriens pour les faire disparaître de la région.

Le fils de Kiyâ Buzurg-Ummîd, Muhammad II, entreprit en 1138 à consolider le petit territoire nizârien, jusqu'à sa mort en 1162. Par la suite, comme la période était plus favorable et plus paisible, l'imâm Hasan ‘Alâ Dhikrihi al-Salâm, le descendant légitime de Nizâr, assuma pleinement la responsabilité l'administration de l'État nizârien.

La «Grande Résurrection»

En 1162, Hasan II succède à son père (al-Qâhir). Il va complètement bouleverser les conceptions religieuses nizâriennes. Le 8 août 1164, il proclama la «Résurrection des Résurrections» (Qiyâmât al-Qiyâmât) devant une assemblée de croyants réunis à Alamût. Cette proclamation initiait les croyants au sens caché (bâtin) de la révélation pour dévoiler la vérité (haqîqat), elle avait pour conséquence la levée de la loi religieuse (charia), non pas en l'abolissant mais en la considérant comme une étape préliminaire avant de la parachever avec la signification intérieure. Le cycle prophétique de Mahomet désormais achevé, les imâms avaient pour mission de dévoiler le sens caché, en expliquant la dimension intérieure du Coran, en allant au sens premier, c'est-à-dire à la source de la révélation.

L'ismaélien nizârien Abû Ishâq-i Qohistânî de la fin du XVe siècle rapporte un extrait de la Grande Résurrection :

«O vous, les êtres qui peuplez les univers! Vous, génies, hommes et anges! Sachez que Mawlâ-nâ (notre Seigneur) est le Résurrecteur (Qâ'im al-Qiyâma). Il est le Seigneur des êtres, il est le Seigneur qui est l'existence absolue (wujûd mutlaq), excluant ainsi toute détermination existentielle, car il les transcende toutes. Il ouvre la porte de sa miséricorde, et par la lumière de sa connaissance il fait que tout être soit voyant, entendant, parlant, vivant pour l'éternité. [4]»

Le règne de Hasan ‘Alâ Dhikrihi al-Salâm fut bref, il est tué par blessure en 1166[5]. Son successeur l'imâm Nûr al-dîn Muhammad poursuivit cette mission spirituelle jusqu'en 1210. L'imâm suivant Jalâl al-dîn Hasan proclama que la communauté entrait à nouveau dans une période de clandestinité (satr). Hasan III mit plus d'emphase sur la sharî‘a afin d'établir de bonnes relations avec les sunnites, cela lui permit d'acquérir de nouveaux territoires. Son fils Muhammad III donna légèrement moins d'importance à la sharî‘a, il restructura la doctrine et la pratique de la dissimulation de la foi (taqiyya) fut rétablie pour entrer de nouveau en période de clandestinité (satr).

Les Nizâriens et les Croisés en Syrie

Selon Isabelle Baudron, les relations entre les Templiers et les ismaéliens d'Alamût sont attestées dans la chronique de Jean de Joinville, biographe de saint Louis. L'auteur rapporte la visite du Vieux de la Montagne, chef des nizâriens, à Acre. Il est alors reçu par le roi Louis IX. Au-delà de cette rencontre, il y a un échange de cadeaux entre les deux souverains, rendu envisageable par un frère prêcheur breton qui parlait l'arabe. Plusieurs fois, les nizâriens ont rendu visite aux croisés à Acre et surtout aux Hospitaliers. Le Vieux de la Montagne avait demandé l'aide de saint Louis contre les Mongols qui envahissaient la Perse (et qui finirent par prendre Alamût) (Voir le récit haut en couleur de la rencontre entre les émissaires d'Alamût et saint Louis).

Le déclin

L'État ismaélien à Alamût prit fin au XIIIe siècle avec l'invasion des Mongols dirigée par le conquérant Houlagou Khan; Rukn al-Din Khûrshâh fut assassiné au cours de cette invasion vers 1255-56. L'ismaélisme nizârien se perpétua en Perse, caché sous le manteau du soufisme; un début d'émigration vers l'Inde s'amorça.

Néanmoins en Syrie au début du XIVe siècle, le voyageur Ibn Battuta rapporte :

«Je quittai cette ville[6], et je passai par le château de Kadmoûs, puis par celui de Maïnakah[7], celui d'Ollaïkah[8], dont le nom se prononce comme le nom d'unité d'ollaïk, et celui de Misyâf, et enfin par le château de Cahf[9]. Ces forts appartiennent à une population qu'on nomme Elismâïliyah[10] ; on les appelle aussi Elfidâouiyah[11] ; et ils n'admettent chez eux aucune personne étrangère à leur secte. Ils sont , pour ainsi dire, les flèches du roi Nâcir[12], avec lesquelles il atteint les ennemis qui cherchent à lui échapper en se rendant dans l'Irâk, ou ailleurs. Ils ont une solde ; et lorsque le sultan veut envoyer l'un d'eux pour assassiner un de ses ennemis, il lui donne le prix de son sang ; et s'il se sauve après avoir accompli ce qu'on exigeait de lui, cette somme lui appartient ; s'il est tué, elle devient la propriété de ses fils. Ces Ismaéliens ont des couteaux empoisonnés, avec lesquels ils frappent ceux qu'on leur ordonne de tuer.»

— Ibn Battûta, op.  cit. , vol.  I, p.  157-158.

Les descendants

On connaît mal l'histoire des nizâriens dans la période qui suivit les destructions et les massacres des Mongols. Ce qui reste de la communauté se disperse en groupes isolés et tente de survivre le plus discrètement envisageable, toujours sous la menace de persécutions des sunnites. Le mouvement connaît une certaine résurgence au XVe siècle. La petite ville iranienne d'Anjudan est choisie comme siège de la communauté et des missionnaires sont envoyés en Inde et en Asie centrale.

Au XIXe siècle, Hasan ‘Alî Shâh, imâm héritier de la longue succession des imâms ismaéliens nizâriens, reçoit le titre d'Aga Khan des mains du Shâh d'Iran. Obligé de quitter l'Iran pour des raisons politiques, Hasan ‘Alî Shâh s'installe en Inde. L'administration britannique impose aux Khôjas de le reconnaitre comme leur imam, énormément refusèrent. Actuellement, c'est le prince Shâh Karîm al-Husaynî Aga Khan IV qui dirige la communauté ismaélienne.

Les imams nizâriens du XIe au XIIe siècle

Imams ismaéliens
Les imâms nizâriens en Perse et en Syrie
Règne Imâm Représentant de l'Imâm Région (s)
1094 - 1095 Nizâr Hassan ibn al-Sabbâh Perse
1095 - 1096 ? Hassan-i Sabbâh Perse et Syrie
1096 ? - 1124 Hassan-i Sabbâh Perse et Syrie
1124 - 1138 Perse et Syrie
1138 - 1162 Perse et Syrie
1162 - 1166 Perse et Syrie
1166 - 1210 Perse et Syrie
1210 - 1221 Perse et Syrie
1221 - 1255 Perse et Syrie
1255 - 1257 Perse et Syrie

Notes à propos des nizârites

Doctrine du Ta‘lim

Fréquemment défini comme l'enseignement de l'Imâm, la doctrine du ta‘lîm fut développée surtout par Hasan-i Sabbâh. Al-Ghazali utilisa le mot de ta‘lîmiyya pour désigner les Ismaéliens pour les attaquer avec une hostilité particulièrement violente dans son traité Kitâb al-Mustazhirî. Les Ismaéliens généralement ne suivent pas le sens littéral du Qur'ân, mais bien plus le sens ésotérique (bâtin) qui est donné par l'Imâm; cet enseignement est nommé couramment (ta‘lîm). Ainsi les Ismaéliens accordent énormément d'importance à l'exégèse spirituelle (ta'wîl) qui consiste à découvrir le sens caché derrière le zâhir. Le ta'wîl donné par l'Imâm éclaircit les versets allégoriques du Coran et donne le sens ésotérique des réalités transcendantales (haqâ'iq). Grâce à cet enseignement ta‘lîm le croyant (murîd) a l'opportunité de connaître et de s'unir à la Déité. La Charia|sharî`a dans le sens de religion littérale est néanmoins utile dans l'ismaélisme elle forme la première étape de l'initiation. Comme l'Imâm est Sâmit (Silencieux) ce n'est pas lui qui enseigne les mustajîbs (néophytes), c'est le Hujja qui transmet la ta‘lîm de l'Imâm. Grâce à son inspiration divine (ta'yîd) et son raisonnement pur (‘aqlânî) le Hujja est capable de transmettre l'enseignement de l'Imâm à l'adepte. L'homme laissé à lui-même est incapable de percevoir les réalités spirituelles, car ce dernier à tendance à associer à la Déité des qualités anthropomorphiques.

Durant le Cycle d'épiphanie (Dawr al-kashf) où l'Imâm se manifeste totalement; le zâhir et le bâtin sont en concomitance; les adeptes connaissent le bâtin du zâhir, la présence du Hujja n'est par conséquent plus indispensable. Il n'y a par conséquent plus de ta‘lîm.

Étymologie de assassin

Existe-t-il un lien étymologique entre les termes haschisch et assassin ? Sur ce sujet, les avis divergent. Dans le Trésor de la Langue Française Informatisé, on peut lire la thèse qui a beaucoup prévalu en Occident depuis les Croisades jusqu'à nos jours : le terme assassin provient de l'italien assassino, assessino, lui-même emprunté à l'arabe hashishiyyin, nom donné aux Ismaëliens de Syrie par leurs ennemis[13], et désignant les consommateurs de haschich. Cette étymologie et la légende qui l'accompagne ont nourri l'imagination de nombreux auteurs, parmi lesquels on peut citer l'écrivain slovène Vladimir Bartol (Alamut), le scénariste et dessinateur de bandes-dessinées italien Hugo Pratt (La Maison dorée de Samarkand). Depuis les attentats du 11 septembre, enfin, certains voudraient établir des parallèles, sinon une filiation, entre les méthodes (présumées) de la secte des assassins et celles d'al-Qâ`ida[14].

Cette grille de lecture est cependant remise en cause à plusieurs niveaux.

  1. Initialement, lors du voyage de Marco Polo, Alamut n'est plus qu'une ruine, ce qui affaiblit énormément la portée de son témoignage : au contraire de ce qu'il prétend, il n'a pas été le témoin oculaire direct des faits qu'il relate. Son témoignage ne mentionne d'ailleurs pas explicitement le haschisch dans le conditionnement des fedayins[15], mais «certain breuvaige à boire, par le moyen duquel ilz eſtoient incontinent troublez de leur eſperit, & venoient à dormir profondement».
  2. Par la suite, sur le plan pharmacologique, le haschisch ne paraît pas à première vue la substance tirée du règne végétal la plus indiquée pour conditionner des hommes à l'assassinat politique, ni à favoriser son exécution (timing, coordination psychomotrice indispensable pour l'approche de la cible)... Rappelons qu'à cette époque, la pharmacopée arabe fait appel de manière courante à l'opium ainsi qu'à des solanacées qui seront qualifiées au XIXe siècle d'héroïques (jusquiame, belladone). Le psychiatre libanais Antoine Boustany analyse les rapports des haschischins du XIIe siècle et des terroristes des Temps Modernes avec la drogue : «A mon avis, accusation et rumeur sont dénuées de fondement et ne sont pas conforme à la réalité chez ce corps d'élite. Les présenter comme de vulgaires drogués ou des malades agissant sous l'effet de substances toxiques relève de l'aberration, d'une méconnaissance des faits ainsi qu'à la limite du dénigrement. [... ] Mais dire qu'ils sont mus par une "drogue" sans seringue, divine ou idéologique, rend mieux compte de la réalité et paraît plus satisfaisant pour l'esprit. »[16]
  3. L'orientaliste français Henry Corbin penche pour une construction mentale fantasmatique, et parle de «roman noir qui a obscurci longtemps le nom de l'Ismaélisme en absence de textes authentiques. Les responsables sont probablement, en premier lieu, l'imagination des Croisés et celle de Marco Polo. Mais au XIXe siècle toujours, un homme de lettres et orientaliste autrichien von Hammer-Purgstall projetant… son obsession des «sociétés secrètes», les soupçonna de l'ensemble des crimes qu'en Europe les uns attribuèrent aux Francs-Maçons, les autres aux Jésuites; il en résulta cette "Geschichte der Assassinen" de 1818, qui passa longtemps pour sérieuse. À son tour, Silvestre de Sacy, dans son "Exposé de la religion des Druzes" de 1838, soutient avec passion son explication étymologique du mot " Assassins " par le Hashshâshîn (ceux qui font usage du hashîsh). […] Le plus étrange est que des Orientalistes se soient faits ainsi, en compagnie d'auteurs avides de sensationnel, les complices, jusqu'à nos jours, de cette rumeur anti-ismaélienne qui aurait pour origine le califat abbasside de Baghdad. Wladimir Ivanow et la "Ismaili Society" de Karachi (anciennement à Bombay), démentent cette étymologie. » Bernard Lewis dans son ouvrage traduit et préfacé en 1984 par Maxime Rodinson, fait cette même critique en excluant la possibilité que le mot assassin vienne de l'arabe Hashshâshîn[17] mais il ne propose pas de solution alternative.
  4. Amin Maalouf, donne dans son roman Samarcande (mettant en scène, entre autres, Hassan ibn al-Sabbah), une étymologie différente. Le mot proviendrait de asâs[18], qui veut dire «base, fondement». «D'après les textes qui nous sont parvenus d'Alamout, Hassan aimait appeler ses adeptes "Assassiyoun", ceux qui sont fidèles au Assas*, au "Fondement" de la foi (Assas veut aussi dire "Gardien" en arabe), et c'est ce mot, mal compris des voyageurs étrangers, qui a semblé avoir des relents de haschich. »

Apparition

Les Nizârites ont un grand rôle dans le jeu vidéo "Assassin's Creed", Le héros du jeu (Altaïr) étant lui même un membre de ce groupe.

Assassins

Le mot apparaît en Europe au moment de la rencontre entre les Croisés et le le monde musulman, au Moyen Orient.

En 1175, un rapport d'un envoyé de l'empereur Frédéric Barberousse en Égypte et Syrie note : "Sachez, qu'aux confins de Damas, d'Antioche et d'Alep, il existe dans les montagnes une certaine race de Sarrasins qui, dans leur dialecte, se nomment Heyssessini, et en romain, segnors de montana. Cette race d'hommes vit sans lois; ils mangent de porc contre les lois des Sarrasins et disposent de l'ensemble des femmes, sans distinction, y compris leurs mère et sœurs. Ils vivent dans les montagnes et sont presque imprenables car ils s'abritent dans des châteaux bien fortifiés.... Ils ont un maître qui frappe d'une immense terreur l'ensemble des princes sarrasins proches ou éloignés, mais aussi les seigneurs chrétiens voisins, car il a coutume de les tuer de surprenante manière.... De leur prime jeunesse jusqu'à l'âge d'homme, on apprend à ces jeunes gens à obéir à l'ensemble des ordres ainsi qu'à l'ensemble des paroles du seigneur de leur terre qui leur donnera alors les joies du paradis parce qu'il a pouvoir sur l'ensemble des dieux vivants. On leur apprend aussi qu'il n'y a pas de salut pour eux s'ils résistentà sa volonté.... Alors, comme il leur a été appris et sans émettre ni objection ni doute, ils se jettent à ses pieds et répondent avec ferveur qu'ils lui obéiront en toutes choses qu'il donnera. Le prince donne alors à chacun un poignard d'or et les envoie tuer quelque prince de son choix. "[19]

Ce récit se faisait certainement l'écho de ceux des musulmans sunnites opposés à la secte, toujours inconnue pour les chrétiens.

Quelques années plus tard, c'est l'évêque Guillaume de Tyr qui écrira sur eux :"Le lien de soumission et d'obéissance qui unit ces gens à leur chef est si fort qu'il n'y a pas de tâche si ardue, complexe ou dangereuse que l'un d'entre eux n'accepte d'entreprendre avec le plus grand zèle à peine leur chef l'a-t-il ordonné. S'il existe, par exemple, un prince que ce peuple hait ou dont il se défie, le chef donne un poignard à un ou plusieurs de ses affidés. Et quiconque a reçu l'ordre d'une mission l'exécute sur-le-champ, sans considérer les conséquences de son acte ou la possibilité d'y échapper. Empressé d'accomplir sa tâche, il peine et s'acharne aussi longtemps qu'il faut jusqu'à ce que la chance lui donne l'occasion d'exécuter les ordres de son chef. Nos gens comme les Sarrasins les appellents Assissini; l'origine de ce nom nous est inconnue. "

En 1192, après les meutres de princes et d'officiers musulmans, tombe sous leurs coups de poignards le premier chrétien : Conrad de Montferrat, roi du royaume latin de Jérusalem. Ce meutre va marquer les esprits des Croisés et faire passer le surnom donné à la secte dans le langage familier.

Il faudra les recherches historiographiques, à partir du XIXe siècle, pour sortir le Vieux de la Montagne et ses partisans des récits moyenâgeux et comprendre l'histoire ce cette branche de la religion musulmane.

Notes et références

  1. arabe : bāṭinīy, ??????
  2. arabe : bāṭin, ?????, occulte; secret; ésotérique
  3. Chapitre d'introduction de Christian Jambet dans La Convocation d'Alamût, de Nasîr al-dîn Tûsî p.  12-13
  4. Extrait traduit par Henry Corbin, "Huitième Centenaire d'Alamût", pp. 299-300
  5. Daftary, 1990, p. 391
  6. Sahyoûn où se trouve la forteresse de Qal'at Salah El-Din connue sous les noms de Qal`at Sahyun ou Château de Saône.
  7. Château de Maïnakah en arabe : qalʿa manīqa, ???? ??????? (position : 35° 14′ 03″ N 36° 05′ 46″ E / 35.23428, 36.096139)
  8. Château d'Ollaïkah en arabe : qalʿa al-ʿulayqa, ???? ???????, se prononce comme ollaïk (en arabe ʿullayq, ????? «ronce») selon Ibn Battuta (position : 35° 10′ 38″ N 36° 07′ 22″ E / 35.177128, 36.122816)
  9. Château de Cahf, en arabe : qalʿa al-kahf, ???? ????? «citadelle de la caverne» (position : 35° 01′ 18″ N 36° 05′ 32″ E / 35.021773, 36.092234)
  10. Elismâïliyah : les ismaéliens
  11. Elfidâouiyah : les fedayins , de l'arabe : fidāʾī, ????? «celui qui se sacrifie» pl. fidāʾīyūn, ???????. Ce nom a été repris par les commandos palestiniens dans le conflit avec l'état d'Israël.
  12. An-Nâsir Muhammad sultan mamelouk burjite d'Égypte qui règne sur la Syrie au moment du voyage d'Ibn Battuta.
  13. Définitions lexicographiques et étymologiques de Assassin du CNRTL.
  14. Philippe Ilial, La secte des assassins à travers les chroniques médiévales.
  15. Polo, Marco. Le Livre des merveilles. Edition J. Longis, 1556 Lire en ligne, p. 17-19.
  16. Antoine Boustany, Drogues de paix, drogues de guerre, Hachette, coll. «Littératures», Paris, septembre 1998, 232 p. , partie Folie chimique ou divine ?, chap.  2 («VI»), p.  p. 126-144
  17. Les Assassins, Bernard Lewis, Ed. Complexe n°3 (ISBN 2-87027-123-9) p. 46-47.
  18. (persan : asās, ????, base ; fondement ; fondation ; racine) qu'on peut rapprocher pour son sens de al-Qâ`ida (arabe : qāʿida, ?????, base ; fondement ; fondation ; socle ; règle ; principe)
  19. Bernard Lewis - Les Assassins. Terrorisme et politique dans l'Islam médiéval - pp. 37 - Éditionss Complexe - Bruxelles - 2001 - ISBN 2-87027-845-4

Annexes

Liens externes

Bibliographie

Notes et références

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